Comment voyageait-on il y a deux siècles… en Bretagne… Le guide Joanne (1884), la bible des voyageurs de l’époque vous en donne un petit aperçu…
…Les dépenses d’un voyage en France varient tellement, suivant les goûts, les habitudes, la fortune, l’appétit, l’âge, l’intelligence des voyageurs, le nombre de leurs compagnons, la nature des pays qu’ils visitent, la longueur du trajet… enfin tant d’autres causes que l’on ne peut déterminer même d’une manière approximative qu’une sorte de minimum. En général 12 fr par jour ou 360 fr par mois (frais de transport compris) doivent suffire à des jeunes gens qui voyagent … ensemble, font un certain nombre de courses à pied, savent, dans l’occasion, porter leur petit bagage eux-mêmes, prennent cependant quand cela devient nécessaire des porteurs, des guides des bateaux et des voitures particulières…. Pour une femme qui ne peut jamais porter son bagage, la dépense quotidienne peut s’élever, en moyenne, à 15 ou 20 fr.
Moyens de transport
Les voies ferrées qui sillonnent la Bretagne appartiennent à trois réseaux différents : 1 – celui de l’Ouest, 2 – le réseau de Paris à Orléans, 3 – le réseau de l’état….
Les compagnies de l’Ouest et d’Orleans organisent chaque année des trains de plaisir ou d’excursion…qui permettent aux touristes de faire à prix réduit un voyage circulaire en Bretagne ou en Normandie..
Voitures de correspondance et voitures particulières
Lorsqu’on quitte les chemins de fer pour prendre les routes de terre, on doit le plus souvent se contenter de voitures de correspondance. Or sauf sur certains lignes importantes, ces voitures indignes du nom de diligences laissent généralement tout à désirer. On n’y a jamais…la place nécessaire ; elles manquent trop souvent de propreté ; presque toujours elles sont dures.… On trouvera… dans presque toutes les villes de Bretagne des voitures particulières avec lesquelles on peut faire 50 kil. par jour en moyenne. Le prix de ces voitures varie de 12 à 18 fr pour une voiture à un cheval, de 25 à 30 fr … à deux chevaux, selon l’époque et l’affluence des voyageurs.
Après avoir souffert dans ces voitures… on finit à pied.
Le mode de locomotion le plus intéressant, le plus utile, le plus indépendant, le moins fatigant et le moins coûteux, c’est le voyage à pied. Les effets surprenants des voyages à pied sur la santé « de l’âme et du corps », leurs plaisirs si nombreux, si purs, si vifs, si variés, leurs inconvénients et leurs ennuis parfois aussi agréables que leurs plaisirs…
Et de citer Toeppfer, auteur de Voyages en zigzag
Il est très bon d’emporter outre son sac provision d’entrain, de gaieté, de courage et de bonne humeur…. Il n’est pas mal non plus de se fatiguer assez pour que tous les grabats* paraissent moelleux et de s’affamer jusqu’à ce point où l’appétit est un délicieux assaisonnement aux mets … les moins délicieux, de n’attendre rien du dehors et d’emporter tout avec soi : son sac, pour ne pas dépendre du roulage ; ses jambes pour se passer du voiturier ; sa curiosité pour trouver partout des spectacles ; sa bonne humeur pour ne rencontrer que de bonnes gens.
Les conseils continuent …
Diminuer son bagage de poids et de volume… il doit peser 6 à 8 kilogrammes au plus et tenir aisément dans un havre-sac**, semblable pour la forme à un sac de soldat, du prix de 12 à 18 fr.
Pour les vêtements de voyage, la laine est de beaucoup préférable à la toile, le coutil*** devient froid quand il est mouillé. Avec des chaussettes de laine on n’a jamais d’ampoule aux pieds. De bons souliers à la semelle épaisse et garnis de gros clous sont indispensables pour la marche.
Qui a dit que la randonnée est une nouvelle mode?
* Grabat : lit qui est misérable
** Havresac : sac porté sur le dos qui contient l’équipement du soldat
*** Coutil : Toile croisée et serrée faite de fil ou de coton servant pour les matelas ou les toiles de pantalon
Définitions inspirées du dictionnaire Petit Robert
Ex Films tournés en Bretagne et lecture et livres se pasant en Bretagne
C’est très intéressant tout ça, je ne connaissais pas ce Rodolphe Töpffer, un polyvalent très doué apparemment. J’ai bien envie de lire quelques textes de ses "voyages en zigzag" , illustrés par l’auteur ! Merci LN.
Et bien,il ne fallait pas être pressé à l’époque pour voyager ,c’est bien ce style de livre.Tu sais quoi?On devrait en faire des photocopies pour les automobilistes ,bloqués dans des bouchons les jours "noirs".Ils relativiseraient leur attente
Trés bien ton article sur le début du tourisme en Bretagne, quelle aventure de voyager, j ai lu aussi que dans certaines auberges, on devait partager son lit avec des inconnus!
Bonne soirée Latil
Très amusant cet article. Pauvres femmes qui devaient payer plus cher car elles ne pouvaient pas porter leur bagage. C’est vrai qu’il y a un monde entre les voyages de l’époque et maintenant où l’on voudrait être rendu avant d’être parti !
et aujourd’hui on râle parce qu’il y a la queue aux péages des autoroutes .. :-)))